J6 - Bapaume ~ Samedi 5 avril ~ 26,2 km Départ 7 h 55, arrivée 13 h 30, temps ensoleillé, frais au départ ( 9º ) puis chaud ( 22° ), D+ 388 m, D- 303 m, balisage correct.
Au cours de ma préparation de ce long trek, j'avais pu lire les déboires de certains de mes prédécesseurs en matière d'hébergement et contrairement à mes habitudes, j'avais fait des réservations bien longtemps à l'avance. Pourtant à Bapaume, c'était complet partout ! Et puisque les cars pour Bapaume sont rares le samedi et inexistants le dimanche matin, j'ai dû réserver hier un taxi qui viendra me récupérer à Bapaume à mon appel pour revenir à Arras. Dimanche matin, le même me ramènera à mon point d'arrêt.
Je quitte donc Arras, avec un sac bien allégé pour pénétrer dans une zone où les combats de la guerre de 14/18 furent acharnés. Cette partie du front fut tenue par les britanniques, ou pour être précis par des troupes de l'ensemble du Commonwealth, de très nombreux cimetières rappellent ce que furent ces années. Toutes les stèles sont identiques et cependant différentes puisque sur chacune figure l'écusson de chaque régiment. Certains ont été tués dans la dernière attaque de la guerre, le 13 ou le 14 septembre 1918. Quelle tristesse de voir là les effets de la boucherie.
Les jours précédents, la faune sauvage était bien absente, mais aujourd'hui j'ai, à plusieurs reprises, fait fuir des lièvres ; il fallait les voir détaler dans les labours et s'arrêter très loin pour m'observer. J'ai aussi aperçu une troupe de biches qui s'est éloignée prudemment.
Finalement, je suis arrivé à 13 heures 30 à Bapaume et, comme convenu, mon sympathique taxi est arrivé peu après mon appel.
Une belle journée donc ; comme dans mes treks précédents, après quelques journées pénibles, mes chevilles ( gravement accidentées en 1990 ) se font oublier et mes pieds s'habituent. Bref, si ce n'était la bronchite que je traîne depuis mi-février, et dont je n'arrive pas à me débarrasser, tout serait parfait.
J7 – Péronne ~ Dimanche 6 avril ~ 29,5 km
Départ 8 h 20, arrivée 15 h, temps gris, 9º puis 14°, avec une bise soutenue de sud-ouest. D+ 474 m, D- 528 m, balisage correct.
Mon taxi était à l'heure devant mon hôtel, le Passe Temps, face à la gare d'Arras et 20 minutes plus tard, il me déposait à Bapaume.
Peu avant la sortie de la cité, le balisage invite à partir vers le sud-ouest, alors que mon tracé inspiré du parcours de Cristina Menghini, la journaliste italienne dont le récit – 70 pages – trouvé sur le Net constitue un précieux document pour parcourir cette Via Francigena, me propose d'aller vers le sud-est. J'ai poursuivi pourtant par le GR qui passe près de deux cimetières britanniques. Une plaque explique qu'en septembre 1918, les forces françaises et britanniques appuyés par les américains lancèrent une formidable attaque, le front fut enfoncé obligeant les armées du kaiser à battre en retraite jusqu'en Belgique. Quelques semaines plus tard, l'armistice était signé.
Après une heure et une large boucle vers l’ouest, le GR revient vers l'est et même vers le nord-est ( ! ), j'ai recoupé mon tracé primitivement prévu. Plus loin, peu avant Rocquigny, village au clocher bien curieux, style Le Corbusier des années 1950, lorsque le GR part vers je ne sais où, j'ai arrêté les frais et emprunté des chemins de terre pour retrouver la piste suivie par Cristina et rejoindre Péronne.
J'ai fait un arrêt pique-nique à Moislains, village où un cimetière français cette fois, rappelle une bataille de 1914. Les forces du kaiser, ayant été bloquées dans leur attaque ( les taxis de la Marne, ça vous rappelle quelque chose ? ), les allemands essayèrent de déborder par l'ouest. Ici, dans la région de Péronne, plusieurs divisions s'entrechoquèrent, la cavalerie française fut décimée par l'artillerie allemande. Le sacrifice ne fut pas vain, car si le kaiser s'est bien emparé d'Amiens quelques jours plus tard, ses troupes furent retardées dans leur mouvement tournant. On connaît la suite...
Par des petites routes et chemins de terre, j'ai fini par atteindre Péronne, presque 30 kilomètres, au lieu des 25 kilomètres si j’avais suivi en totalité l’itinéraire proposé par mon italienne ! Ils sont bien gentils les baliseurs de la Francigena, les tours et les contours, c'est bien pour les marcheurs du dimanche, mais pour les randonneurs au long cours qui ont en tête l'adage « qui veut voyager loin ménage sa monture », ajouter de la distance à la distance... Et puisqu'il semble que la plaisanterie veuille se répéter chaque jour, la leçon est retenue, et dès demain, je suivrai mon tracé élaboré à partir des fichiers de Cristina sans plus désormais me préoccuper des balises du GR et des panneaux de la Francigena.
Mais la journée n'était pas terminée pour autant, arrivé devant mon hébergement, une auberge de jeunesse, elle était fermée. Pas de réponse aux deux numéros de téléphone. Finalement, j’ai appelé un taxi pour rejoindre le gîte de Séraucourt, il reviendra demain me chercher afin que je fasse l'étape, mais le budget en a été écorné ! Les gens de Séraucourt sont super sympas, le maire, le responsable du gîte de la halte nautique, le patron de la brasserie « Le Domaine de l’Arc en Ciel », en face, chacun s'est évertué à gommer les désagréments de mon étape imprévue !
J8 - Séraucourt-le-Grand ~ Lundi 7 avril ~ 32,3 km
Départ 8 h 35, arrivée 15 h 45, D+ & D- 330 m, temps ensoleillé, 14° puis 23°, avec un vent fort de sud-ouest, plus de balisage. Le taxi retenu était bien à l'heure pour me ramener à Péronne afin de me permettre de faire l'étape prévue. Bon côté de la situation, je pars avec un sac léger !
À la lecture du « diario » de Cristina, pour cette journée, j'ai compris qu'elle avait relevé plus rapidement que moi et peut-être même avant son départ les errements du balisage de la Francigena et construit chaque jour son itinéraire pour éviter les « boucles à rallonge » du GR.
Suivant sa trace, j'ai quitté Péronne par un sentier de pays ( balises jaunes de la FFRP ). Ce sera tout au long de l'étape des pistes agricoles, des petites routes, plus rarement des départementales sur de courtes sections. Je suis admiratif, comment a-t-elle fait pour ouvrir … un vrai GR ? En tous cas, aujourd'hui, elle et moi, nous avons fait l'économie de ... 5 kilomètres ! En arrivant à Séraucourt, je retrouve le gîte pour les marcheurs de la Francigena, un abri un peu spartiate mais chauffé, avec 4 matelas, sanitaires avec douches et des habitants très accueillants.
Je suis vanné, est-ce le vent qui soufflait de face comme lors des étapes précédentes, mais ce jour avec force qui en est la cause ou la fatigue accumulée des longues étapes depuis le départ? J'ai traîné la patte sur les trois dernières heures avec des articulations douloureuses. Demain sera un autre jour, une étape bien plus courte heureusement...
J9 - Tergnier ~ Mardi 8 avril ~ 17,1 km
Départ 8 h 58, arrivée 12 h 30, D+ 189 m, D- 145 m, temps ensoleillé puis se couvrant avec quelques gouttes, température un peu fraiche (12º) avec un vent soutenu de sud-ouest, D+ D- , pas de balise.
J'ai pris mon petit déjeuner à la brasserie où André, le chaleureux et serviable propriétaire de la brasserie et ventes d'articles de pêche, me propose de consulter sur son PC la météo pour la fin de semaine, ce devrait être bon, hormis aujourd'hui et demain où il pourrait bien y avoir quelques gouttes !
Comme l'étape est relativement courte, j’ai pris mon temps. J’ai suivi bien sûr l'itinéraire relevé chez Cristina, empruntant d'abord de petites routes, puis après Montescour, des pistes en terre longeant la voie ferrée avant de rejoindre le canal de Saint Quentin durant la dernière heure, un joli parcours. Le ciel s'est progressivement couvert, deux gros noirs m'ont envoyé chacun deux ou trois gouttes, pas plus, mais peu avant Tergnier, le ciel est devenu fort menaçant ce qui me fait accélérer, mais finalement, j'ai échappé à la pluie.
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J'ai décidé d'arrêter à Tergnier – provisoirement ? - ma balade au long cours pour aller soigner cette maudite bronchite qui m’enquiquine depuis la mi-février ; le matin, je me lève en toussant jusqu'au petit déjeuner, ensuite, pendant toute la matinée, le nez prend la relève et je sors le mouchoir toutes les deux ou trois minutes alors que ma gorge est irritée. Ça semble s'améliorer mais si lentement, il ne manquerait plus que ça reparte dans le mauvais sens !
Date 5/04/2014, distance 26,2 km, difficulté T3, D+ 303 m / D- 218 m,
Carte avec le parcours de Arras → Bapaume - détails techniques - fichier GPS [ clic ]
Date 6/04/2014, distance 29,5 km, difficulté T3, D+ 307 m / D- 361 m,
Carte avec le parcours Bapaume → Péronne - détails techniques - fichier GPS [ clic ]
Date 7/04/2014, distance 31,3 km, difficulté T3, D+ 330 m / D- 304 m,
Carte avec le parcours Péronne → Séraucourt le Grand - détails techniques - fichier GPS [ clic ]
Date 8/04/2014, distance 17,5 km, difficulté T2, D+ 189 m / D- 146 m,
Carte avec le parcours Séraucourt le Grand → Tergnier - détails techniques - fichier GPS [ clic ]
Quelques considérations sur cette Via Francigena
Itinéraire Il y a matière à questions sur la façon dont a été conçue la via Francigena. Certes, elle suit globalement l'itinéraire historique mais sur le terrain, le balisage vous emmène loin de l'axe reliant deux points d'étape, de manière incohérente. Le guide anglais édité par Cicérone semble avoir rectifié nombre de ces errements. Cristina la journaliste italienne, dont j'ai récupéré les fichiers traces, s'en est manifestement inspirée, en l'améliorant d’ailleurs. Ainsi, chaque jour, c'est 2, 4 ou 5 kilomètres de moins à parcourir ce qui, sur des étapes déjà bien longues, n'est pas à négliger. Qui voudrait faire cette longue balade a donc intérêt à ignorer totalement les balises tant du GR que celles de la Via Francigena !
Période Faut-il partir en début de printemps pour arriver en Italie alors que le thermomètre est encore raisonnable ou bien démarrer au cœur de l'été en affrontant les chaleurs de l'hexagone pour entrer en Italie au début de l'automne ? Pour ma part, je n'avais pas le choix, mais il me semble que la seconde formule serait souhaitable, surtout pour franchir le Grand Saint-Bernard. Tout le monde n'est pas alpiniste pour franchir ce col, comme je l'envisageais et avais l'expérience pour le faire, alors que la neige y est encore abondante.
Hébergements De ma lecture des divers récits en ligne, j'avais relevé que tous les marcheurs ont connu des problèmes d'hébergement, certains à plusieurs reprises : hôtels fermés ( toujours cette fameuse loi sur l'accès des handicapés qui conduit à la fermeture les petits hôtels de province bien incapables de financer les dits travaux ) ou complets, propriétaires de chambres d'hôtes injoignables et, contrairement à mes habitudes, j'avais fait des réservations plus d'un mois avant mon départ non sans, pourtant, me cogner le nez sur quelques hôtels déjà complets !
La formule n'est pas idéale car elle ne permet pas de tenir compte, pour organiser son étape, de la forme ou de la météo. Si je reviens suivre ce chemin, j'utiliserais peut-être mon camping-car pour, chaque jour par les transports en commun ou d’un coup de stop, revenir le chercher et m'avancer, une formule déjà utilisée en d'autres occasions.
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