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  • Photo du rédacteurChristian B.

Veilles de quart en mer de Baffin

Dernière mise à jour : 24 févr. 2023

L'ancre relevée à 3 heures du matin alors qu'il neigeotait, nous avons quitté l'abri du Baad Fiord et rejoint l'immense Jones Sound, long de 130 milles nautiques et large de 60, cap vers Nuuk à exactement 1.000 milles nautiques, loin dans le sud du Groenland et que l'on devrait atteindre dans 8 ou 9 jours.

Lors de mon quart ( de 6 à 9 heures ), le paysage était fantasmagorique avec les icebergs qui se profilaient dans le brouillard et la côte d'Ellesmere enneigée qui se laissait deviner.

Il a neigé un peu plus franchement au cours de mon quart suivant ( de 15 à 18 heures ), alors que nous quittions le Jones Sound pour emprunter le Lady Ann Strait entre l'île Devon et l'île Coburg. La veille à la glace est restée incontournable et de fait, nous avons croisé de temps à autre des icebergs et surtout des growlers, blocs de glace bien plus dangereux pour un bateau que les icebergs qui s'aperçoivent de loin et que le radar confirme ce qu'il refuse souvent de faire avec des blocs de glace moins gros !

Nous effectuons nos quarts à trois équipiers outre le capt'ain ou Charles le second qui ont des horaires de quart différents des nôtres.

Chacune des trois équipes s'organise comme elle l'entend et dans la notre, l'un barre durant une heure pendant que les deux autres scrutent la mer devant le bateau et indiquent s'il y a lieu la présence d'icebergs ou de growlers devant l'étrave, auquel cas le barreur modifie la route de quelques degrés pour la reprendre une fois le danger écarté. Au bout d'une heure, nous permutons...

La troisième heure est de fait plutôt pénible, chacun est frigorifié malgré plusieurs couches de vêtements ( pour ma part : tee-shirt, fine polaire, gilet en duvet, grosse polaire et grosse veste de quart, bonnet et gros gants, deux paires de chaussettes ) et chacun a hâte d'aller se réchauffer...

Nous faisons causette : Emmanuel et moi échangeons nos impressions sur ce voyage exceptionnel, hors du temps ; avec Olivier, on se rappelle d'autres voyages ici ou là dans d'autres coins de la planète, on demande des nouvelles des copains, on évoque quelques copines et on parle même politique !

Mais les conclusions là, sont unanimes et les hommes politiques, ces profiteurs qui ne pensent qu'à leur carrière, qu'à cumuler les avantages plutôt que de travailler à réformer, trouvent à bord bien du mépris ...

De temps à autre, l'un traduit en anglais pour notre norvégien qui ne parle pas notre langue, et Jan nous remercie en proposant souvent d'aller faire du café ou du thé.

Lorsque la brume se lève que le paysage autour du bateau vaut le coup d'œil, les équipiers de quart ne manquent pas d'appeler les autres et nous nous retrouvons tous dans le cockpit ou sur le pont mitraillant à qui mieux mieux, ce que nous venons de faire alors que l'île Devon nous offre le superbe spectacle de nombreux glaciers vêlant dans la mer et que volent en nombre autour du bateau des goélands bourgmestres et des guillemots de Brunnich ou à miroir. Malgré la température, on a alors du mal à quitter le pont...

Notre quart touche à sa fin. Lorsque nous avons relevé Gaby, Laurene et Luisa, il y a bientôt trois heures, j'ai posé la question à Luisa, en français car notre italienne parle remarquablement notre langue, question qui est vite devenue rituelle : « tu restes avec nous ? » à moins que ce ne soit - dans le mode interro-négatif - « tu ne restes pas avec nous ? » ce qui la fait rire. Notre quart se termine dans moins de 30 minutes et Emmanuel lance « Fabio ne devrait pas tarder » et un bon quart d'heure avant la relève, Fabio apparaît. Chaque jour, il apparaît plus tôt, aussi je pense qu'avant la fin de notre expédition, il fera le quart avec nous ! C'est l'heure, Rosa et Giorgio, rejoignent Fabio pour nous remplacer. Le barreur transmet à qui le remplace les consignes et observations, le cap à suivre, la dérive due au vent ou aux courants, la difficulté à rester sur la route avec les vagues qui nous bousculent et puis ciao, on va se recoucher pour revenir ... dans six heures !

Carte avec le parcours du Baad Fiord à Sisimiut - détails techniques - fichier GPS [ clic ]


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